Encore un projet en retard, et pourquoi ? !

Vous avez sans aucun doute rencontré cette situation où un projet qui semblait parfaitement planifié et organisé finit par prendre du retard et frustrer tout le monde. Les retards peuvent entraîner bien des complications : des coûts supplémentaires, des pertes de revenus, une dégradation de l’ambiance d’une équipe ou d’une relation client/fournisseur, créer des clivages entre les développeurs et les chefs de projet.

Mais c’est un phénomène très fréquent, vous n’êtes pas les seuls ! ! C’est là que je vous propose d’utiliser le cône d’incertitude pour illustrer la réalité d’un projet. Que ce soit pour vous, ou vos collègues, c’est très parlant ! 🙂

Les projets de développement logiciel sont intrinsèquement sujets à une forte variabilité. Les conditions externes, les découvertes en cours de projet, les besoins métier, les outils techniques et bien d’autres facteurs peuvent évoluer de manière imprévisible, rendant difficile la prédiction des performances futures.

Nous allons explorer comment le cône d’incertitude peut aider y voir plus clair tout au long du cycle de vie d’un projet, et mieux comprendre la réalité autour d’un projet de sa planification.

De mon côté, je me suis intéressé à cette méthode durant les révisions de ma certification PSM1. J’ai donc décidé d’en apprendre toutes les facettes, et de vous les résumer dans cet article.

Commençons par quelques statistiques sur les projets informatiques :

  • Selon une étude de McKinsey, seulement 26% des projets informatiques sont achevés à temps et dans les limites budgétaires prévues. 17% des projets informatiques dépassent leur budget initial de plus de 200%.
  • Les projets de logiciels dépassent en moyenne leur budget initial de 66%, selon une enquête de The Standish Group.
  • Seulement 16,2 % des projets sont considéré comme étant achevés dans les délais et le budget, avec toutes les fonctionnalités promises, selon le Chaos Report 2021 de The Standish Group.
  • Seulement 31% des projets informatiques sont achevés à temps et dans les limites budgétaires, selon une enquête de PMI.
  • Depuis 2011, le Chaos Report du Standish Group indique que les projets logiciel en contexte Agile disposent de trois fois plus de taux de réussites qu’une gestion de projet Cycle en V… Cette statistique se base sur les conditions de réussite de projet classique(et non sur des indicateur agile), et est étudiée sur 50 000 projets.

Si nous pouvons constater que le retard est le résultat de la majorité de projets, et encore plus dans la gestion de projet dite “traditionnelle” nous consacrons toujours énormément de temps et d’énergie à produire de fausses estimations. Mais est ce que nous prenons réellement en compte l’incertitude ?

Le Cône d’incertitude

Dessiné en 1980 par Barry Boehm(ingénieur en génie électrique et professeur à l’Université de Californie du Sud,), le cône d’incertitude est un outil précieux pour suivre les niveaux d’incertitude d’un projet. Steve McConnell(expert en développement logiciel) l’a introduit chez Microsoft pour illustrer cette réalité,

D’après lui, les estimations peuvent varier considérablement, parfois jusqu’à un facteur de 16 entre l’estimation la plus optimiste et la plus pessimiste. qu’un projet estimé à 100 jours homme peut en réalité prendre entre 25 et 400 jours homme pour être achevé, quel que soit les compétences et la maitrise de l’équipe ou la méthode d’estimation utilisée.

McConnell a lui-même été impliqué dans le sauvetage de projets majeurs chez Microsoft, démontrant que même avec une équipe expérimentée et talentueuse, les prévisions restent incertaines.

Nous pouvons constater qu’au commencement d’un projet, l’incertitude règne en maître. Les inconnues sont nombreuses et les éléments connus se font rares, contrairement aux suppositions qui elles sont nombreuses….

Puis, au fur et à mesure que le projet avance, d’étape en étape, les informations sont collectées et des décisions sont prises. La direction à prendre devient alors plus claire : le niveau d’incertitude diminue et les estimations augmentent en précision (le cône d’incertitude rétrécit).

La connaissance et la mise en avant des incertitudes permettent de s’adapter et d’établir des objectifs un peu plus proches de la réalité.

Comment utiliser les données du cône d’incertitude en gestion de projet “traditionnelle” ?

  • Alimenter une matrice des risques et réfléchir à des solutions pour les incertitudes les plus fortes.
  • Ajuster le plan, les coûts et délais pour s’approcher de la réalité.
  • Appliquer des multiplicateurs de gestion de risques.
  • Revoir l’organisation de l’équipe et du projet.
  • Communiquer !!

Généralement, le cône sera appliqué sur l’ensemble du projet et non à la tâche.

Et pour une utilisation en contexte Agile ?

Pour citer le manifeste Agile : La réponse au changement, de préférence au respect d’un plan.

L’approche incrémentale et itérative permets de s’adapter rapidement, de valider ou non rapidement des hypothèses, Il est donc préférable de se lancer dans un ou plusieurs sprints pour obtenir des données plus précises, plutôt que dépenser des sommes énormes pour des estimations très peu fiable. Nous allons donc quantifier autour de la valeur créée, de la maitrise et de la connaissance ainsi que la compétence qui monte dans l’équipe et dans l’organisation autour du produit.

En contexte Agile, nous pourrons adapter le cône aux users storys présente dans le sprint backlog ou product backlog, et donc obtenir de la précision au sprint ou à la tâche.

Le temps permettra d’augmenter la précision des estimations (si on estime).

Le cône au service d’une planification Agile :

  • Le cône permet de réduire les risques grâce à leur identifications, d’inspecter, de visualiser, de prendre consciences.
  • Proposer de meilleures solutions : s’adapter en limitant les impacts, trouver des solutions pour résoudre/contourner les problématiques et continuer à livrer de la valeur tout en respectant le budget.
  • Il favorise une meilleure transparence et communication avec les parties prenantes : il aide à comprendre les blocages et les risques, ce qui peut augmenter la compréhension et potentiellement le soutien recueilli.
  • Suivre l’avancement des hypothèses et alimenter l’amélioration continue.
  • Etablir un plan de livraison plus proche de la réalité.

En utilisant le cône d’incertitude, l’équipe comprend mieux les risques et les incertitudes associées aux tâches. Elle identifie les dépendances et améliore la pertinence de ses choix pour atteindre les objectifs. Cela offre donc la possibilité de vérifier régulièrement les coûts et d’ajuster la portée du projet en prenant en compte les retours utilisateurs.

Ces informations sont cruciales pour favoriser la créativité et dynamiser les échanges au sein de l’équipe. Si elles sont partagées avec les parties prenantes, cela encourage la communication et les échanges.

L’incertitude peut être réduite en recueillant les retours des utilisateurs tout au long du cycle de vie du produit, ce qui permet d’ajuster et de valider les fonctionnalités en fonction de leurs besoins réels : La confiance entre le client et les développeurs est établie grâce aux livraisons fréquentes de fonctionnalités, ce qui renforce la fiabilité des estimations, ce qui diminue l’incertitude au fil des itérations.

Exemple utilisation

Illustration des storys points avec le cône d’incertitude

L’exemple ci dessous est dans un contexte de création de boutique en ligne.

Nous pouvons voir que l’équipe pense qu’elle rencontrera le plus de difficulté sur les moyens de paiements. Pourquoi ? Manque de compétence ? Incertitude de la bibliothèque utilisée ? Si oui Pouvons nous changer de bibliothèque ? Devons nous faire appel à un expert externe pour récupérer de la connaissance dans l’équipe ? Comment pouvons nous avancer ?

Bonus

Illustrer la suite de Fibonacci

Nous pouvons représenter visuellement la suite de Fibonacci pour l’expliquer, 13 points représente la plus grande difficulté, 0 la plus grande simplicité.

Merci à mon collègue de formation “Deviens meilleur Scrum Master” par Scrum Life, Sébastien Tardivaud pour l’idée !

Que faut il retenir pour la certification PSM1 de scrum.org au sujet du cône d’incertitude ?

Plus le temps passe, plus l’incertitude réduit, et plus les hypothèses et estimations sont précises.

Les sources:

McKinsey, « Delivering large-scale IT projects on time, on budget, and on value, » (2012): **https://www.mckinsey.com/business-functions/digital-mckinsey/our-insights/delivering-large-scale-it-projects-on-time-on-budget-and-on-value**

The Standish Group, Chaos Manifesto 2013 https://www.immagic.com/eLibrary/ARCHIVES/GENERAL/GENREF/S130301C.pdf

PMI, Success in Disruptive Times : **https://www.pmi.org/-/media/pmi/documents/public/pdf/learning/thought-leadership/pulse/pulse-of-the-profession-2018.pdf**)

The Standish Group, Chaos Report 2011 – 2023 :

Manifeste Agile fr :

https://manifesteagile.fr/

Scrum : Un compagnon de voyage intelligent par Gunther Verheyen

Agile Estimating and Planning Mike Kohn

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